Un lieu structuré ne s’envisage pas sans l’acoustique qui l’incarne, car elle représente l’identité sonore de ce lieu. Mis à part l’atrium de l’ENSAPLV, qui est un lieu important dans notre petite histoire de chœur, les lieux présentés ci-après sont aujourd’hui tous des références dans l’histoire et la théorie de l’architecture. Ce sont tous des lieux emblématiques, incarnant chacun une époque et une pensée.

La forêt, est dans la culture celte un des premiers lieux qui interrogent le divin par sa géométrie et son acoustique. L’arbre est vertical, rejoint la terre et le ciel, survit à l’homme. Le théâtre romain d’Orange est un lieu conçu pour la voix. L’origine grecque du théâtre le lie à langage du philosophe ; mais il est aussi un symbole d’opulence et d’oisiveté fort de la pax romana. L’abbaye du Thoronet est une abbaye cistercienne romane. Prônant un retour à la stricte observance de la règle de Saint-Benoît, les moines cisterciens bâtirent une abbaye sobre, dépourvue d’ornements superflus. L’église de l’abbaye dispose d’une impressionnante résonance, la deuxième au monde après le Taj Mahal. Ces dimensions sont modestes car elle est vouée à un ordre régulier et n’a pas vocation à impressionner les croyants.

La cathédrale gothique de Beauvais est l’édifice religieux possédant la plus haute voûte au monde. Appartenant à un ordre séculier, l’église doit accueillir un maximum de fidèles et impressionner pour montrer la puissance de la religion catholique. La lumière abonde à travers les immenses vitraux rendus possibles grâce à la finesse constructive de son architecture. S’étant effondrée à plusieurs reprises sous son propre poids, la cathédrale représente par ailleurs la limite de l’architecture gothique. Enfin, le Grand Palais est le fleuron français de l’âge industriel. Construit pour l’Exposition Universelle de 1900, il doit servir de modèle pour un monde entrant dans une nouvelle ère. La structure du bâtiment, réduite à son minimum, permet d’imaginer un édifice de taille colossale composé d’une membrane de verre d’une extrême finesse.

L’intérêt sonore de ces lieux se situe dans les matériaux qui les composent et dans les vides qu’ils délimitent. En fonction de leurs géométries, de leurs dimensions et de leurs matérialités, ils génèrent un son différent. Rendez-vous y. Plongez dans ces espaces si différents et pourtant tous liés par une recherche de sacralité. Le moindre son a alors toute son importance dans la mise en scène d’un espace-symbole qui fait appel à nos imaginaires.


La forêt de Brocéliande

La Forêt de Brocéliande
Une canopée pour toit, des troncs pour colonnes, la terre et l’humus pour sol, la forêt se présente naturellement comme un espace structuré. Lieu habité dès les débuts de l’homme, lieu de divination et de rapport à la nature, la forêt reste encore aujourd’hui un refuge à nos esprits.

Echo, réverbération et résonance
Entendre une réponse quand on parle seul, comme un miroir qui réfléchirait une image parfaite, c’est ce que l’on nomme un écho. Contrairement au miroir nous renvoyant de la lumière, le son nous revient distinct grâce à sa vitesse, plus lente que celle de la lumière. Ainsi, plus la distance entre l’émetteur et la paroi est grande, et plus l’écho nous reviendra tard dans le temps. Une paroi lointaine, comme une falaise de l’autre côté de la vallée, laisse une distance suffisante à l’intelligibilité de la réflexion.

Des réflecteurs plus proches d’un émetteur de son, comme les arbres d’une forêt ou les murs d’un bâtiment quand on s’y trouve, nous présentent un phénomène particulier chargé d’une quantité d’informations sur l’espace. C’est la réverbération. Elle se décrit par sa durée (c’est-à-dire le temps que met un son à diminuer de 60dB depuis la fin de son émission), le temps d’arrivée des premières réflexions puis des suivantes, la présence ou non d’une fréquence de résonance.


La réverbération raconte ainsi une géométrie, une dimension et une matérialité d’un lieu à travers les sons et leur rapport au temps.

Dans l’acoustique d’une forêt, rien ne résonne. En effet, les arbres, principaux réflecteurs du son dans la forêt, ne s’organisent pas de manière parallèle : ils ne forment pas de paroi qui pourraient entretenir la réflexion du son. Les sons sont ici sans cesse réfléchis sur des surfaces différentes. Le temps de réverbération est long dans une forêt (entre une et cinq secondes). Par exemple, un pic-vert qui tape contre un arbre produit un son qui dure longtemps.

Les subtiles différences qui rendent la réponse acoustique plus chargée dans le grave ou dans l’aigu font de chaque forêt un ensemble de phénomènes acoustiques bien distincts. S’il nous est naturel de parler de paysage en se référant à notre vue, nous avons moins l’habitude de décrire un paysage par ses caractéristiques acoustiques ; elles varient pourtant autant que les caractéristiques visuelles ou olfactives. Une forêt de pins sonnera toujours différemment qu’une forêt de chênes.

La richesse de l’acoustique forestière est subtile et dépend ainsi des accidents que le son rencontre en évoluant dans un contexte particulier.


Le Théâtre Antique d’Orange

Le Théâtre Antique d’Orange
Sous le règne d’Auguste, au 1er siècle avant notre ère, les romains édifièrent un théâtre dans la ville naissante d’Arausio contre la colline Saint-Eutrope.

La conception romaine du théâtre, fortement inspirée des théâtres grecs et décrite par Vitruve dans son traité sur l’architecture, en fait un espace fermé alors que les théâtres grecs sont ouverts sur le paysage. Le regard ici portait sur le mur de scène monumental avec un riche décor en marbre et des statues dont celle de l’empereur qui trône toujours dans la niche centrale. Les romains maîtrisaient l’acoustique de leurs constructions. Par exemple, à Pompéi, le Théâtre et l’Odéon (plus petit et couvert) avaient chacun leur destination acoustique : la parole et la musique.

Pour étudier les caractéristiques acoustiques de ce lieu, nous nous plaçons dans la situation du théâtre tel qu’il a été conçu par les romains. Nous imaginons un acteur sur la scène et nous regardons quel est le trajet des ondes sonores parvenant à deux auditeurs situés dans le public.

Réflexions sonores et renforcement acoustique
L’onde sonore se propage dans l’espace et se réfléchit sur les surfaces qu’elle rencontre, à la manière de la lumière sur un miroir. En suivant ce principe élémentaire, nous allons voir comment les réflexions engendrées par l’architecture permettent une acoustique adaptée à la parole et aux représentations de spectacles à l’époque romaine.

Son direct
Le son direct arrive au spectateur sans rencontrer d’obstacle. L’angle des gradins (27° puis 31°) est primordial pour que tout le monde puisse voir mais aussi entendre. Le son direct n’est ainsi pas absorbé par les spectateurs du dessous.

1ère réflexion : l’orchestre
Le son se réfléchit par terre sur l’orchestre qui était constitué d’un dallage en pierre. Depuis la scène qui se situe à environ 1,40m de haut par rapport à l’orchestre, la réflexion rallonge légèrement le chemin par rapport à l’onde directe. Le retard qui en résulte n’est presque pas perceptible et contribue grandement à renforcer l’intensité du son.

2ème réflexion : mur de scène
Le son se réfléchit sur le mur derrière les acteurs. Comme la scène est assez peu profonde (10m environ), le chemin supplémentaire parcouru est plus long de 17m par rapport au chemin direct. Cette distance correspond à un retard acceptable pour les spectateurs de l’ordre de 40 à 50 millisecondes. Les consonnes qui forment l’architecture de la parole, ont une durée du même ordre de grandeur : tout retard supérieur engendre un écho et donc une perte d’intelligibilité.

Subtilités architecturales
Ces réflexions résultent d’une conception architecturale réfléchie et élaborée par l’expérience et la sensibilité des romains. Des détails contribuent à renforcer l’intensité sonore afin que tout le public puisse entendre les acteurs sur la scène sans déformation notoire.

On constate par exemple que si la scène avait été plus haute, la trajectoire du son réfléchi sur l’orchestre aurait rencontré comme obstacle les spectateurs. Cette réflexion aurait alors été absorbée par les corps. On constate aussi qu’une scène plus profonde aurait introduit une trajectoire réfléchie sur le mur plus longue. Un écho serait alors perceptible et nuisible à l’intelligibilité. La galerie supérieure, aujourd’hui disparue, servait vraisemblablement à isoler le théâtre des bruits alentours. Ceci permettait aux spectateurs des derniers rangs de pouvoir entendre correctement malgré la distance qui les sépare des acteurs.

Le toit du mur de scène avait des caractéristiques absorbantes afin d’éviter les réflexions qui auraient conduit à un effet d’écho, nuisible pour l’intelligibilité. Le toit actuel assure aujourd’hui des caractéristiques similaires pour l’acoustique.

Usages contemporains
Aujourd’hui une partie de l’architecture a disparue : Le décor du mur, le dallage en pierre de l’orchestre, la disposition de la scène. La réverbération est donc différente de celle de l’époque romaine. Cette architecture, plus dépouillée, se trouve ainsi plus adaptée à la musique, comme en témoigne la programmation actuelle du théâtre d’Orange.


L’abbaye du Thoronet

L’abbaye du Thoronet
Construite à partir des années 1150 par les moines cisterciens, l’abbaye du Thoronet est un exemple remarquable de l’architecture romane cistercienne.

L’église est modeste par ses dimensions : environ 40 mètres de long sur 20 mètres de large et 16,50 mètres de hauteur sous voûte. Elle comporte une nef à quatre travées couverte d’une voûte en berceau légèrement brisé. Trois travées ouvrent sur des bas-côtés par des grandes arcades. La quatrième travée, est flanquée des bras du transept, c’est la croisée.

Lorsque l’abbaye était en activité, l’église était destinée à des offices réservés aux moines et aux frères convers. Des stalles étaient disposées en vis-à-vis le long des murs de la nef et étaient séparées en trois chœurs (ou ensemble de stalles) : le chœur des moines (proche de l’autel), le chœur des moines malades et celui des frères convers.

A l’exception des tuiles et des vitraux, l’église est faite entièrement de la pierre locale. La taille rigoureuse de ce calcaire très dur, la finesse des joints et l’absence d’ornementation offrent des surfaces qui sont presque parfaitement planes, sans aspérités. Ces conditions permettent une réflexion presque totale, comme la lumière sur un miroir, des ondes sonores dans le domaine de fréquence de la voix humaine, notamment des fréquences basses.

Pour mettre en avant toute la particularité acoustique de cette église nous distinguerons : la sonorité de position et la sonorité instrumentale. La première s’intéresse au cheminement du son depuis l’émetteur jusqu’au récepteur. La seconde décrit les résonances intrinsèques à l’architecture.

Sonorité de position
Les voûtes en arc brisés permettent la convergence des ondes sonores selon un axe particulier : l’axe focal. A l’image de la lumière à travers une loupe qui se concentre en un point, l’énergie sonore se concentre suivant cet axe focal.

Au Thoronet, cet axe se situe au tiers de la hauteur de la voûte, soit à 5,50 mètres au dessus du sol. Cela rend la sonorité de position particulièrement efficace car la diffusion du son au niveau du sol par la voûte se fait exactement sur la largeur de celle-ci.

Pour une personne localisée sous la voûte, le son qu’elle émet va converger sous la voûte dans une zone déterminée par la trajectoire qui passe précisément par l’axe focal.

Un émetteur situé au milieu de la nef couvrira entièrement le sol de la nef par ses réflexions. Cet émetteur pourrait être le moine qui dit la messe pour les autres.

Un émetteur situé latéralement, couvrira une zone autour de son point symétrique. Cet émetteur pourrait être le moine, assis sur une stalle qui chante le psaume. Le moine qui se trouve en face de lui entend un son renforcé du fait la convergence des ondes au dessus de sa tête, ce qui est bénéfique au chant monodique.

Sonorité instrumentale
La nef et le transept se comportent comme deux résonateurs couplés ayant chacun une fréquence fondamentale (qui correspond à une note donnée).

Au Thoronet le rapport entre ces deux notes est consonant du fait des proportions des volumes respectifs de la nef et du transept qui sont quasi-identiques. Ce rapport (hauteur de la voûte / hauteur totale) est de 1/3. Ainsi l’église se comporte comme la caisse de résonance d’un violon qui renforce le son produit par la vibration des cordes.

Enfin le caractère le plus marquant de cette église est celui du temps de réverbération qui se trouve être l’un des plus importants au monde (plus de 8 secondes pour les fréquences de la voix humaine). La prolongation de l’onde sonore après son émission provient de la rigueur mise en oeuvre par les bâtisseurs qui ont su monter les murs gouttereaux de la nef quasiment parallèles (seulement 10cm d’écart sur la longueur de la nef). De plus, la taille soignée des pierres offre des surfaces planes sans aspérités. La pierre très dure, peu poreuse, absorbe très peu l’énergie sonore.

Usages
Bien plus modeste dans sa taille que le théâtre antique d’Orange, l’église du Thoronet possède des caractéristiques étonnantes. Il s’agit d’un édifice parfaitement adapté au plain-chant des moines dans lequel on a la sensation d’être enveloppé par le son qui émane, semble-t-il, de l’église elle même, accentuant le caractère sacré du lieu.


La cathédrale de Beauvais

La cathédrale de Beauvais
Construit à partir de 1225, à l’emplacement d’une cathédrale carolingienne, cet ambitieux édifice gothique n’a jamais été achevé. Seuls le chœur et le transept sont édifiés. La nef qui ne possède qu’une travée devait se prolonger sur la cathédrale primitive et n’a jamais été achevée, faute de moyens.

La pierre employée est une craie suffisamment dure pour pouvoir être élevée à plus de 48 m de hauteur et résister à son poids. Le travail des tailleurs gothiques produit des surfaces complexes et finement décorées.

Bien qu’inachevée, cette cathédrale symbolise les ambitions de l’architecture gothique à travers ses dimensions colossales et la verticalité qu’elle exprime.

Analogie
Guidés par l’analogie que Chateaubriand donne dans Le Génie du christianisme, nous pouvons mettre en relation la cathédrale gothique et la forêt. Cette analogie, n’est pas seulement architecturale et spirituelle, mais aussi musicale : « l’architecte chrétien, non content de bâtir des forêts, a voulu, pour ainsi dire, en imiter les murmures. »

Réverbération haute et basse
En cohérence avec la quête d’élévation spirituelle, les sons se perdent dans les hauteurs de la voûte et dans la profondeur de l’édifice, de la même manière que les sons de la forêt se dissipent dans les feuillages et à travers les troncs d’arbre.

Dans les parties hautes, le son se réfléchit dans la verticalité sur les vitraux jusqu’au toit formé par la voûte avant de redescendre vers le sol. L’intensité de l’énergie sonore diminuant avec le chemin parcouru et les rebonds sur les surfaces, le son reste comme prisonnier de cette espace en hauteur duquel il parvient à peine s’échapper. On entend cette réverbération comme un murmure lointain.

Dans les parties basses de la cathédrale, le son se réfléchit sur les voûtes des bas-côtés et dans les chapelles du chœur. Il rencontre les colonnes en pierre taillées et ciselées, telles des troncs d’arbres, qui diffusent alors le son dans diverses directions, créant ainsi une profondeur dans le son.

Cette réverbération ne fait qu’accentuer les dimensions monumentales perceptibles à l’œil.

Géométrie
La hauteur de la voûte est d’environ 8m pour une hauteur totale sous voûte de 48m, soit un rapport de 1/6 (contre 1/3 au Thoronet). La sonorité de la cathédrale ne se comprend pas comme au Thoronet, où la convergence des ondes sonores est efficace. Elle est ici diffuse du fait des proportions monumentales de l’édifice.

Mise à l’échelle des moyens
L’échelle monumentale de la cathédrale, en totale opposition avec la modestie cistercienne, confère à l’acoustique de l’édifice une atmosphère profonde qui convient au croyant en quête de spiritualité. Cependant pour exploiter le potentiel instrumental de la cathédrale il faut une puissance considérable afin de mettre en vibration tout le volume de l’air qu’elle contient.

Les incantations chantées par une poignée de moines seraient bien vaines et iraient mourir dans les hauteurs de la voûte. Le renforcement du son comme au Thoronet, s’obtiendrait plutôt par un chœur composé de plusieurs dizaines ou centaines de personnes afin de remplir l’espace sonore.

Cette puissance, s’il elle ne vient pas de l’humain peut provenir d’ailleurs. Comme le vent qui souffle dans les feuillages et les branches, l’orgue, prolonge les murmures et les grondements des tempêtes.


Le Grand Palais

Le Grand Palais
En 1900, la France est la seconde puissance économique d’Europe. L’idée de la conception d’un lieu pouvant accueillir un grand nombre de personne pour des événements contribuant au rayonnement de sa capitale est fertile à la veille de l’exposition universelle.

La révolution industrielle a permis la standardisation d’éléments constructifs métalliques bien plus fins que ne le permettait la pierre et pour des portées bien supérieures au bois. Le vaisseau principal, d’une longueur de près de 240 mètres, est constitué d’un espace imposant surmonté d’une large verrière. La voûte en berceau légèrement surbaissée des nefs nord et sud et de la nef transversale (paddock), la coupole sur pendentifs et le dôme proposent une structure de fer et d’acier culminant à 45m de hauteur.

La question de l’acoustique de la salle a été complètement évincée de la conception au profit de la grandeur et de la lumière. L’identité acoustique du Grand Palais n’en est pas moins intéressante.

Champs direct et champs diffus
Notre rapport à l’expression et à l’écoute dans un lieu donné induit la distinction de deux champs acoustiques : le champ direct (ou champ libre) et le champ diffus.

On parle de champ direct quand l’onde sonore nous arrive sans embûche depuis l’émetteur. Le son n’est alors pas marqué de l’effet acoustique du lieu, il serait perçu comme en situation de plein air, sans vent.

Le champ diffus désigne tous les sons qui ont été transformé par les propriétés acoustiques d’un lieu, c’est-à-dire l’écho, la réverbération, la résonance, etc. Ce champ est constant dans une pièce, peu importe l’emplacement de l’auditeur, le niveau sonore du champ diffus reste le même. Il se définit ainsi, par son homogénéité, en opposition au champ direct. On peut parler de « bruit de fond ».

Distance critique
Notre écoute du champ acoustique n’est jamais complètement directe ou diffuse, elle résulte toujours d’un mélange des deux. En effet, le champ libre tient compte des propriétés de diffusion d’une onde sonore. Le niveau d’une onde sonore diminue de 6dB lorsqu’on double notre distance à l’émetteur en champs direct. Plus on est proche d’une source sonore, plus on apprécie une grande proportion de champs direct, mais plus on s’éloigne, plus on écoute le champ diffus, c’est à dire la salle.


Une distance particulière à la source nous fait apprécier un équilibre entre champs direct et champs diffus. On qualifie cette distance de « critique » car au-delà de celle ci, l’intelligibilité est dégradée.

Le Grand Palais accueille des événements brassant une large audience. Il est donc commun de s’y retrouver en présence de centaines de personnes qui bavardent tous. Pourtant on peut y parler sans être obligé de forcer la voix ; c’est parce que le champ diffus, qui est très dense et très long, n’est a contrario pas très fort.

La raison est simple : malgré leur haute capacité à réfléchir le son, les parois sont très éloignées des sources sonores. Le son leur arrive donc plus faible. Elles renvoient alors une accumulation de petites stimulations. Le résultat observable est intéressant, on entend un brouhaha constant qui a l’air d’émaner du lieu même, et qui ne vient gêner en rien une discussion avec une personne proche.

Timbre du son
Le timbre du son réfléchi sur le métal et sur le verre peut être qualifié de froid. Les matériaux utilisés absorbent en effet les fréquences médiums et basses et renvoient les fréquences aiguës. On reconnaît là la qualité propre d’un son métallique.


L’atrium de l’ENSAPLV

L’atrium de l’ENSAPLV
Lieu de rencontre et de passage, semi-ouvert et semi-fermé, l’atrium constitue un lieu particulier de l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris La Villette.

Si l’atrium n’est pas adapté à une voix qui parle à cause de la réverbération trop présente qui crée un bruit de fond constant, cet espace possède des qualités sonores intéressantes pour la musique et le chant notamment. C’est-à-dire que l’acoustique de l’atrium n’est pas adaptée à l’usage qui en est fait. Elle l’est pourtant pour bien d’autres usages.

Géométrie
Du point de vue acoustique, la géométrie est un paramètre important qui va déterminer l’efficacité de la réverbération. Le volume de l’atrium est très simple, composé d’une trame régulière et modulaire. En approximation, il s’agit d’un parallélépipède dont les dimensions sont dans des rapports simples : la hauteur est le double de la largeur, et la longueur quasiment le triple de la largeur (l8,5 x L25x h16,5). Or, le parallélisme des parois et les proportions du volume sont deux éléments clés propices à créer des résonances acoustiques.

Matériaux
Les matériaux déterminent la capacité du son à se réfléchir sur les surfaces qu’il rencontre. Le béton au sol, les parois verticales composées de verre et d’aluminium laqué, la paroi vitrée de la verrière : il s’agit là de matériaux très peu absorbants. La nature du matériau va jouer sur l’absorption du son en fonction des fréquences : le verre absorbe davantage les basses fréquences que les hautes, et le béton davantage les hautes fréquences que les basses. Le timbre musical en devient particulier.


Mais au delà de cette propriété intrinsèque des matériaux, c’est l’état de surface qui joue un rôle : tout est très lisse et les surfaces sont planes. Il s’agit là de conditions propices à la réverbération du son. Ceci s’écoute aisément : le son d’un claquement de doigt dure quelques secondes.

Réverbération
La géométrie et les matériaux participent à la réverbération du son. Le son se réfléchit sur les parois lisses de l’atrium et selon la hauteur du son émis, la réponse de la salle sera plus ou moins long. La grande quantité de verre de cet espace fait que quel que soit le son émis, les sons aigus seront plus présents que les sons graves.